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Massage thaï ancien, un art thérapeutique

Aujourd’hui, le massage thaï ancien est encore bien mal compris, voir assimilé à un massage ultra-dynamique qui peut être brutal. Heureusement, il ne se réduit pas à cela. A l’inverse, le massage thaï ancien se fait dans le respect de la tradition, dans l’écoute du corps, et la plus grande douceur. C’est le corps du massé qui indique la bonne pression aux mains du masseur. Bien plus encore, le massage thaï ancien vise à réduire les déséquilibres du corps et de l’esprit, il est clairement thérapeutique, et plus largement une voie d’éveil.

Dr Jivaka : histoire sur l’origine du massage thaï ancien

Massage thaï ancien

Remontons à sa création pour mieux comprendre cette discipline. Le massage dit « thaïlandais » est en réalité indien, né dans le Nord de l’Inde il y a environ 2 500 ans d’après les Écritures bouddhistes (chinoises, Pali et sanskrit-Tibétaines). Ce massage provient du célèbre docteur Jivaka Komarabhacca[1], guérisseur laïc des plus réputés. Il fournissait alors des soins médicaux gratuits au Bouddha ainsi qu’à d’autres moines et était également connu pour être le médecin du roi Bimbisara. On peut voir aujourd’hui encore à Rajghir en Inde les ruines de son monastère de soins.

Bodhisattva de la médecine, le Dr Jivaka excellait dans la pharmacopée par les plantes médicinales, les minéraux, l’acuponcture, la chirurgie et le massage. Bien qu’il n’y ait pas de certitude sur la création du massage thaï par le Dr. Jivaka lui-même, son nom a pourtant perduré dans la tradition orale d’enseignement de maîtres à disciples depuis le 1ersiècle[2].

A cette époque, en Inde, la médecine faisait partie intégrale du bouddhisme, codifiée dans le cadre des Écritures bouddhistes, formant des moines guérisseurs qui utilisaient le massage, considéré comme un art de la santé parmi d’autres, tels que les plantes médicinales, les minéraux, la chirurgie, etc., et tout cela intégré à un chemin vers l’éveil.

Ce sera un des fondements au développement ultérieur des universités monastiques bouddhistes[3].

Par la suite, le bouddhisme a été en quelque sorte « écrasé » par la montée de l’Hindouisme sur le territoire indien, et s’exile peu à peu en Thaïlande du Nord entre le IIème et IIIème siècle avant J.C. Il s’y construit des temples avec dispensaires et écoles de médecine adjacents transportant avec eux les enseignements du Dr Jivaka, considéré aujourd’hui comme le père de la médecine thaïlandaise. D’ailleurs, à chaque massage, une prière de gratitude en son nom est effectuée par le praticien.

Cette pratique est indienne à l’origine, et lorsque le bouddhisme s’exile, la Thaïlande accueille et conserve cet art.

Se crée tout naturellement le nom de « massage thaï ancien », nuat phaen boran en thaïlandais.

Notons que dans le massage thaï, il y a principalement 2 écoles, celle du Nord de la Thaïlande, dite également Nuad Bo Rarn –massage millénaire médical– que je pratique, et celle du sud, plus appuyée et plus rapide.


Une voie de guérison :

Parce que cette pratique vient de la tradition bouddhiste tibétaine, elle va de pair avec les 3 générosités citées ci-dessous, enseignées par le Bouddha pour soi-même et son prochain :

  • offrir le bien-être matériel (drap, nourriture, abri, médicaments…)
  • protéger chacun de la peur en communiquant l’intrépidité
  • enseigner le précieux Dharma.

Pour parvenir à ces qualités, on peut voir les maladies comme des invitations à effectuer des changements radicaux dans notre vie pour guérir d’un mal intérieur profond : par exemple, surmonter l’orgueil, développer la voie de la compassion ou encore intégrer la souffrance sur la voie de l’éveil.

massage thaï ancienBien sûr, cette pratique contribue bel et bien à la santé physique via le circuit énergétique, et travaille sur le système nerveux et musculaire. Je reste parfois sidérée devant cette si précieuse pratique. Appliquée à des personnes qui ne marchent quasiment plus (sans fractures), le massage va jusqu’à réveiller, assouplir leurs muscles et réactiver les systèmes neuromusculaires. Avec beaucoup de travail, elles peuvent remarcher, bien que trop souvent la médecine académique n’y voyait nulle solution.

Et dans l’optique de la voie bouddhiste, en effet, le massage thaï ancien n’oeuvre pas seulement sur le corps, il se réalise une interconnexion entre le masseur et le massé, corps, parole et esprit. Il devient thérapeutique.

Une voie de transformation / ou d’éveil :

Souvent, le massage du corps offre une grande relaxation, et plus encore une transformation thérapeutique, via des prises de conscience. Il n’est pas rare, pour les gens en difficulté, qu’en fin de massage, lors du thé, ils délivrent des secrets pesants ou résolvent un nœud psychique. Parfois, ça leur arrive dans les jours qui suivent.

massage thaï ancienLe massage thaï est également une porte vers la conscience de son propre corps. Le massé peut être à l’écoute de son corps lors des étirements par exemple ou dans le ressenti de l’énergie qui le traverse. Progressivement, il affine ses sensations. Il peut aussi apprendre à respirer avec le mouvement de chaque posture de massage, telle une méditation où le méditant est invité à garder son attention sur son souffle. Le massé peut alors prendre conscience de l’importance de la respiration dans sa vie. Elle permet un bon équilibre et empêche le stress de s’accumuler.

Aussi, dans le donné-recevoir et l’écoute entre le masseur et le massé, se crée une alliance d’amour et de bien-être qui permet au massé de tenir un état d’être de confiance, de lâcher-prise. Il entre alors dans un état demi-conscient, permettant ainsi des visualisations simples (couleurs, symboles, …), un sommeil réparateur (rêves, voyage intérieur) et bien souvent des prises de conscience immédiates ou postérieures.

Enfin, les états subtils rencontrés durant le massage permettent, selon l’énergie du masseur, d’ouvrir des espaces intérieurs. Dans mon expérience, j’observe avec émerveillement chaque corps. Par exemple, lors de burn out, je ressens un corps très fatigué, abandonné, qui semble découvrir le plaisir d’être enfin touché, comme s’il avait été oublié par la personne qui le contient. Je l’accueille dans ce qui l’est. Le corps a besoin de vivre l’énergie qui le traverse, sans jugement. C’est ce que je permets ainsi à la personne via le massage. Cette sensation s’apparente à une rencontre de son être, contenu dans chaque cellule du corps.

En effet, une énergie bloquée peut créer un état de déprime, dépression, surexcitation, colère etc. Dans cette écoute de cœur à corps, le massage thaï ancien permet à cette énergie dense de circuler et passer à autre chose. Le corps s’éveille ainsi à une nouvelle énergie dont il besoin.

Réalisé dans la tradition, ce massage s’effectue en 4 jours.

Le 1er jour vise à rencontrer le masseur pour une entrevue en face à face. Le jour suivant, à l’heure indiquée par le masseur, un premier massage de 2h30 s’effectue, puis un 2ème et un 3ème les deux jours suivants, et ce, à la même heure. Ainsi l’énergie mise en circulation dans le corps du massé continue son mouvement toutes les 24h et s’inscrit, telle une empreinte, dans le corps du massé.

Un vrai cap est franchi pour le massé. Ce protocole représente pour lui un réel engagement car il prend alors soin de lui-même.

Pour ma part, j’effectue ce soin uniquement sur demande ou lorsqu’il y a nécessité, car cela requiert un engagement certain de la part du massé. Je témoigne également de l’avancée de la personne dans son rapport au corps, aux anciennes mémoires cellulaires, et à son esprit.

J’ai très à coeur cet art thérapeutique, et me fait l’honneur de la pratiquer dans le respect de la tradition, de moi-même et du massé.

[1] Egalement appelé Dr Shivago Komarpaj

[2] Il est cité dans les illustrations de l’ouvrage bouddhiste tibétain de référence, Les 4 Tantras basées en partie sur un texte ancien de la fin du Ier siècle, dit également “Tantra des instructions secrètes sur les 8 branches, l’essence de l’élixir d’immortalité” (en anglais : « Tantra of secret instructions on the Eight Branches, the Essence of the Elixir of Immortality »).

[3] Enseignés et appliqués dans les monastères et également au sein des familles. Dans les familles, il s’agissait principalement d’une tradition orale (la plupart des gens ne pouvant pas lire) transmise d’enseignant à élève. Depuis au XVIIIème s., les enseignements ont été écrits pour préserver la tradition médicale le plus longtemps possible et la rendre accessible au plus grand nombre et aux générations futures. C’est d’ailleurs depuis la peinture de mandalas peints qu’on a pu identifier le Dr Jivaka (et son nom écrit sur un mandala du VIIème s.)